
L’année fut riche en belles réalisations de tous genres : romans graphiques, séries d’aventures, de science-fiction, fantastiques, historiques, western, humour, biographies, reportages, BD animalières, genres qui attestent la vitalité du 9e art. Ces 15 derniers mois, près de 5000 titres sont parus. On ne dénombre pas les nombreuses rééditions, les intégrales, les tirages spéciaux. Il y a à peine 20 ans, il ne paraissait guère plus que 500 titres par année.
Chroniques de Jérusalem par Guy Delisle : Quel ouvrage sur la ville de Jérusalem et sur la guerre israélo-palestinienne ! Les communautés, le blocus de Gaza, les colonies, les considérations onusiennes, le mur de la séparation, Hébron avec sa poignée de colons énervés, l’effervescence de Ramallah et même les plages de Tel-Aviv sont évoqués dans ce qui constitue un reportage à la fois touchant et percutant. Même l’opération « Plomb durci » est évoquée avec ses raids assassins sur Gaza qui ont entraîné 1 400 morts. La lecture de ce document géopolitique est ventilée par le concours d’anecdotes de la vie quotidienne souvent teintées d’humour.
Blast, La Tête Première par Manu Larcenet : Polza est un personnage gargantuesque rempli de vide. Il porte le poids de culpabilités gigantesques. Cet homme ressent le « blast », un souffle halluciné et explosif plein de couleurs et de vie. Dans le troisième tome, le journal du pachyderme répugnant revient sur son internement à l’hôpital psychiatrique au milieu de tous les patients qu’il surnomme les morts qui marchent. L’album est toujours d’une audace et d’une ingéniosité graphiques inouïes et confirme à quel point cet auteur confronte avec génie les limites de son art.
Bêtes de Somme, Mal de Chiens par Jill Thompson et Evan Dorkin : Bégueule, un pauvre beagle, vivant dans une paisible banlieue, est certain que sa niche est hantée. Ses amis, les chiens du voisinage et un chat, vont appeler le Sage Berger à sa rescousse. Ce dernier est à la tête d’une organisation aidant les chiens à résoudre leurs étranges problèmes. La trame est animée par la magie noire, les grenouilles démoniaques et les animaux spéciaux sous couverture d’horreur, d’humour, d’aventure et de mystère. C’est beau et intense, sombre et lumineux. De surcroît, la présentation sous liseuse est vraiment belle.
Deux généraux de Scott Chantler : L’auteur rend hommage à tous ces Canadiens ordinaires et courageux qui participèrent à la Seconde Guerre mondiale. Ce magnifique petit roman graphique nous rappelle le respect que nous leur devons. L’album raconte l’histoire de son grand-père Law Chantler et de son ami Jack Chrysler alors qu’ils étaient soldats du Highland Light Infantery (HLI) of Canada. Ils prendront part à l’une des opérations militaires les plus marquantes de la Seconde Guerre mondiale : l’invasion de la Normandie par les Alliés en 1944. Ils feront aussi partie du commando qui périt tragiquement en tentant de reprendre le village de Buron, occupé par les Nazis. Ce livre est remarquable. C’est vraiment un beau témoignage ficelé dans un graphisme efficace et plaisant.
Un printemps à Tchernobyl par Emmanuel Lepage : Après Voyage aux Îles de la Désolation, on retrouvera les caractéristiques et les innombrables qualités des crayonnés et aquarelles qui restituent des gens, des regards, des émotions mais aussi des décors apocalyptiques. Les images à couper le souffle sont celles de champs désolés, d’usines désaffectées. Bref, d’une nature ravagée qui tente de reprendre ses droits. Les irradiés, trop pauvres pour partir, trop attachés à leurs terres pour vouloir les quitter, se sont fait une raison et ils ne peuvent imaginer une vie ailleurs. Lepage nous dessine cette vie là-bas, à Tchernobyl. Magnifique !
La saga d’Atlas et d’Axis, tome 1 par Pau : Atlas et Axis rappellent Bone. Les comparses découvrent que la sœur d’Atlas et un bon nombre d’habitants ont été enlevés par des chiens vikings. Commence alors une quête à la poursuite des kidnappeurs qui mènera Atlas et Alexis vers les terres froides du Nord. Les personnages seront confrontés progressivement à des périls de plus en plus grands. Les dialogues et les personnages manquent un peu de profondeur, mais il demeure que nous sommes en présence d’un album au dessin attachant et fort sympathique. Atlas et Axia font penser à Walt Disney et aux Merrie Melodies de Schlesinger.