Actualité

Quand un gouvernement attaque ses propres symboles

Par Vincent Couture le 2012/08
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Quand un gouvernement attaque ses propres symboles

Par Vincent Couture le 2012/08

Les modifications au régime d’assurance-emploi annoncées par le gouvernement fédéral le 24 mai dernier auront des conséquences désastreuses sur les chômeurs de l’Est du Québec, mais aussi sur les employeurs et l’économie régionale, qui repose en bonne partie sur le travail saisonnier. Pensons à des domaines tels que l’alimentation, la sylviculture et le tourisme, qui sont vitaux pour l’économie québécoise.

Le gouvernement prévoit, entre autres, qu’un chômeur dit « prestataire fréquent », soit quelqu’un qui a touché plus de 60 semaines d’assurance-emploi au cours des cinq années précédentes, sera forcé d’accepter un emploi « convenable ». Pour le gouvernement conservateur, un emploi convenable est n’importe quel emploi pour lequel un travailleur est qualifié, à 70 % de son salaire et situé jusqu’à une heure de route de son domicile. Par exemple, un travailleur de Sainte-Blandine qui a reçu des prestations d’assurance-emploi trois mois par année durant cinq ans et qui gagne 14,14 $ l’heure sera obligé d’accepter un emploi au salaire minimum se trouvant à Matane, sous peine de voir ses prestations coupées.

Dans des régions comme le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, des dommages collatéraux majeurs sont à prévoir pour les industries saisonnières. D’après les nouvelles mesures, un travailleur se verra notamment refuser des prestations s’il quitte un emploi permanent pour un emploi saisonnier. L’obligation d’accepter un emploi aux conditions énoncées plus haut aura donc comme conséquence que les travailleurs ne seront plus disponibles pour leur employeur saisonnier. Ces derniers perdront une main-d’œuvre fidèle et qualifiée. Chaque année, ils devront recruter et former de nouveaux employés. Certains devront fermer leurs portes.

Des mesures transitoires et des projets pilotes qui tenaient compte de la réalité du travail saisonnier étaient en place depuis plusieurs années. Ils seront eux aussi abolis alors que la réalité économique de l’Est du Québec, elle, n’a pas changé. À titre d’exemple, une de ces mesures allongeait de cinq semaines la période de prestation des chômeurs, ce qui leur permettait de faire face à une période de vache maigre avant la nouvelle saison.

Il est plutôt ironique de constater qu’un gouvernement si fier de ses symboles, tel l’unifolié, s’attaque directement à l’industrie de l’érable. En effet, une industrie comme l’acériculture a besoin de ses travailleurs saisonniers pour prospérer. Cette vision obtuse et réductrice du marché de l’emploi ne tient nullement compte des réalités propres à notre région. S’attaquer ainsi aux travailleurs saisonniers est non seulement une attaque à notre économie régionale, mais aussi à l’ensemble des Québécois qui doivent subvenir minimalement à leurs besoins.

Ces mesures, arrogantes et dégradantes, sont à l’image de l’attitude des conservateurs depuis qu’ils sont majoritaires. Pour éviter que le gouvernement conservateur mette la clé dans la porte de l’Est du Québec, il faut s’opposer vivement à l’abolition des projets pilotes et aux modifications du régime d’assurance-emploi.

L’adoption de la loi C-38 démontre qu’il est grand temps de réclamer le rapatriement de l’assurance-emploi au Québec. Le régime uniforme actuel, qui s’applique d’un océan à l’autre, ne convient pas à des réalités aussi différentes que l’industrie pétrolière albertaine et l’industrie forestière bas-laurentienne. Les programmes gérés au Québec tiennent davantage compte de nos réalités régionales et sont empreints de solidarité sociale plutôt que de mépris et de répression.

L’auteur est président d’Action chômage Kamouraska.

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