Il y a maltraitance quand un geste singulier ou répétitif, ou une absence d’action appropriée, se produit dans une relation où il devrait y avoir de la confiance, et que cela cause du tort ou de la détresse chez une personne aînée.
– Organisation mondiale de la santé
Cette définition couvre un large spectre d’actions ou de non-actions et les intervenants du milieu sont souvent pris en otage d’un « système » qui se déshumanise sous l’ampleur du vieillissement de notre population. Même les citoyens les mieux préparés et les plus instruits se retrouvent démunis lorsque la démence ou la maladie d’un proche se présente sans avertissement. Il n’y a pas de « méthode parfaite » pour faire face à l’impondérable. Lorsque nous pensons « maltraitance faite aux aînés », nous voyons un bras levé, du harcèlement psychologique ou l’abandon dans un couloir « de la mort » en institution. Quelque chose de frappant et d’évident où nous pourrions agir. Mais tel n’est pas toujours le cas.
Que pensez-vous qui arrive à une personne « institutionnalisée » subitement pour cause de perte d’autonomie légère, pour « prévention » ou par manque de présence familiale ? La rupture est brutale et provoque un traumatisme difficile à évaluer. C’est encore pire dans le cas d’un couple habitué à dormir ensemble, à se faire des repas, à s’occuper de son logement. Ils n’auront plus de vie amoureuse et l’administration lourde de la résidence exigera les repas à 16 h 30, le coucher à 20 h. On peut rétorquer que « le bout de la vie » est ainsi. Il faut « casser » maison et partir vivre en résidence avec ce que cela comporte de changements brutaux. Parfois la famille apporte son aide. Parfois non. Derrière ces réalités admises, il y a « un système » qui ne peut agir autrement, nous dit-on. Il y a du personnel débordé, des ressources financières à la limite de la faillite. Alors on leur dit qu’elles se trouvent « chanceuses » ces personnes âgées, parce qu’on s’occupe relativement bien d’elles. Le système est entré dans la banalisation, une manière d’agir « conforme » à des normes acceptables, à des règles de bon fonctionnement. Comment détecter la maltraitance véritable ?
Nous pouvons définir en cinq points la violence faite aux aînés :
Violence physique : infliger des douleurs ou des blessures, utiliser la contrainte physique, ou recourir à des moyens de contention physiques ou médicamenteux.
Violence psychologique ou morale : infliger des souffrances morales.
Exploitation financière ou matérielle : exploiter ou utiliser de manière illégale ou impropre les fonds ou les ressources d’une personne âgée.
Violence sexuelle : contact sexuel non consensuel avec une personne âgée.
Négligence : refuser de s’acquitter d’une obligation de soin ou ne pas s’en acquitter.
Cela peut supposer un acte conscient et une intention visant à infliger une détresse physique ou morale à une personne âgée. À quel moment doit-on intervenir ? La trousse SOS ABUS de l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées permet de détecter les sources d’une maltraitance ou d’un abus que le silence de la victime rend difficile à démonter. Un petit fils qui « emprunte » de l’argent à sa « mémé1 ». Un fils qui refuse que sa petite fille visite sa grand-mère. Une fille qui fait du chantage pour « placer » sa mère et prendre possession de la maison familiale. Perpétré par une personne connue, le crime ne sera pas dénoncé. Les scénarios dépassent la fiction en réalisme et en deuils, car la douleur des personnes vulnérables rassemble des conséquences psychologiques, physiques, sociales et financières plus difficile à identifier. Il ne faut pas oublier la perte de la foi, du vide existentiel et même du suicide qui demeure un risque important chez nos aînés.
La « vigilance » doit donc s’installer au centre de nos relations humaines. Notre société, malgré des avancées significatives dans le domaine de la détection de la maltraitance faite aux aînés, doit demeurer sensible à ce grave problème. Aucun système n’est parfait, mais il doit toujours être en voie d’amélioration dans la mesure du possible humain.
1. Terme fréquemment utilisé. Décrit malheureusement une forme d’âgisme populaire