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Beausir les mots, une rencontre entre la langue et l’art actuel

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Beausir les mots, une rencontre entre la langue et l’art actuel

Concevoir une exposition collective en art actuel autour du français parlé des Îles-de-la-Madeleine, voici le défi que s’est lancé le centre d’artistes AdMare avec le projet Beausir les mots. Présentée jusqu’au 30 avril à la bibliothèque de Havre-aux-Maisons, l’exposition regroupe les œuvres de 26 artistes et artisans en arts visuels et métiers d’arts contemporains et de quatre auteurs.

Faire acte de patrimoine

Bouci-boula, endormitoire, envarguer, fordilloux, gréement, raizer… Les artistes ont tout d’abord été appelés à piger une lettre de l’alphabet et à choisir un mot commençant par cette lettre dans le Dictionnaire des régionalismes du français parlé des Îles-de-la-Madeleine de Chantal Naud comme point de départ à leur travail. Une invitation à faire acte de patrimoine en s’appropriant la langue comme moteur de création. Se prêtant au jeu, les artistes, les artisans et les auteurs participant au projet ont su se dépasser et faire preuve d’ingéniosité pour nous offrir une exposition collective mettant en valeur la diversité des pratiques et l’amour du français parlé madelinot.

En créant un pont entre le patrimoine et l’art actuel, le projet d’exposition Beausir les mots visait entre autres à faire connaître les pratiques en art actuel à un large public, ainsi qu’à rassembler et à mobiliser les membres de la communauté en arts visuels et métiers d’art contemporains de l’archipel autour du centre d’artistes. « On pense généralement qu’il y a peu d’artistes en art actuel aux Îles, ce qui pose un défi pour justifier l’existence même d’AdMare auprès du CALQ et des autres bailleurs de fonds. Pourtant, nous comptons des artistes établis ayant plus de 25 ans de pratique, ainsi que plusieurs artistes en émergence. La forte participation – 35 dossiers reçus – et l’enthousiasme des artistes et du milieu tout au long du projet témoignent de cette effervescence », souligne la commissaire Katia Grenier.

Beausir les mots présente le travail des artistes et des artisans Ariane C. Arsenault, Marie-Andrée Arsenault, Hugo Blouin, Céline Bouffard, Sophie Bourgeois, Claude Bourque, Hélène Chevarie, Micheline Couture, Rachel Drouin, Marie-Christyne Élie, Martin Fiset, François Forest, Catherine Fournier, Jean-Paul Garneau, Huguette Joncas, Majorie Lapierre, Guy Lavigueur, Marie-Line Leblanc, Annie Morin, France Painchaud, Alexandra Perras-Chenail, Carole Piédalue, Yuli Purwiyanti, Lisandre Saint-Cyr Lamothe, Elyse Turbide et François Turbide, sur des textes de Hugo Blouin, Alexandre Chouinard, Cédric Landry, Réjeanne Lapierre et Suzanne Richard.

Beausir les mots. Art-abécédaire du français parlé des Îles-de-la-Madeleine, aux Éditions la Morue verte, 2011

Art-abécédaire
Pour ceux et celles qui n’auront pas la chance de visiter l’exposition, rassurez-vous : elle se poursuit dans Beausir les mots. Art-abécédaire du français parlé des Îles-de-la-Madeleine, à paraître prochainement aux Éditions la Morue verte. « Avec ce livre d’art, nous voulons offrir plus qu’un catalogue d’exposition, explique Katia Grenier. Le livre présente les œuvres et le processus de création afin de faire connaître les démarches des artistes. Il s’adresse à un large public et offre aussi des outils de lecture pour appréhender l’art actuel. »

Dans une mise en page soignée signée Martin Fiset, Beausir les mots. Art-abécédaire… nous propose un regard neuf sur les œuvres et les pratiques en arts visuels et métiers d’arts contemporains. On y retrouve entre autres des images inédites du photographe Yoanis Menge, qui nous propose une interprétation toute personnelle du travail de chaque artiste. Une occasion unique de découvrir les mots et les expressions du français parlé des Îles, ainsi que l’univers de ses créateurs.

Colis suspect

Dans le cadre de la programmation de Colis suspect, AdMare présente aussi Piñata d’Hugo Blouin jusqu’au 20 mai à l’aéroport des Îles-de-la-Madeleine. Cette installation franchement ludique marie des éléments provenant de différents registres de sens, tels un filet de pêche et un bat de baseball. Elle est constituée de plus de 700 avions en papier tirés du néant et réalisés à partir d’exemplaires ratés du livre Notes d’étrangement aux îles de la Madeleine. C’est d’ailleurs à l’occasion du travail sur cette publication, parue aux Éditions la Morue verte en 2009, que l’intérêt de l’artiste sur l’écart entre sa relation avec son œuvre et celle du public est né. « Piñata suggère que pour n’importe quel interacteur ou visiteur d’une exposition, assimiler une œuvre d’art est l’équivalent de taper sur une piñata et de ramasser les bonbons qui tombent, et qui ne sont pas nécessairement ceux que l’artiste a voulu donner », explique Hugo Blouin. Ce travail de réflexion sur la réception de l’œuvre d’art s’inscrit dans la pratique en art interactif de l’artiste.

À voir

Beausir les mots, jusqu’au 30 avril à la bibliothèque de Havre-aux-Maisons

Piñata d’Hugo Blouin, jusqu’au 20 mai à l’aéroport des Îles-de-la-Madeleine

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