Le Salon du livre de Rimouski fêtera cette année sa 45e édition. À l’occasion de la Journée mondiale du livre et du droit d’auteur, le 23 avril, le Mouton NOIR a rencontré Robin Doucet, directeur du SLR.
Mouton NOIR – Comment se porte la création littéraire en région ?
Robin Doucet – Dans un premier temps, il faut dire que la majorité de la production au Québec se fait à Montréal, et un peu à Québec et dans les régions. Au Bas-Saint-Laurent, nous sommes privilégiés, car il y a quelques maisons d’édition qui sont bien implantées. Je pense entre autres aux Éditions Trois-Pistoles et aux publications L’Avantage, toutes deux situées dans la périphérie rapprochée de Rimouski. Il y a aussi Québec Gerbivol, Trois lunes Éditions, et une grosse maison d’édition spécialisée dans le livre scolaire, les Éditions L’Artichaut.
Si l’on habite la région et qu’on a des velléités d’écriture, on peut expédier nos manuscrits à ces maisons d’édition qui sont à même de faire le travail d’édition, à partir du moment où le manuscrit est arrivé jusqu’à la mise en marché du livre. […] Dans la chaine du livre, il y a l’éditeur, le distributeur, le transporteur, le libraire et le lecteur. Et au-dessus de tout ça, il y a l’auteur.
Certaines maisons d’édition reçoivent tellement de manuscrits que parfois ce n’est pas possible pour elles – parce qu’elles ont de très petites équipes – de répondre à tous. […] À partir du moment où l’on est accepté chez un éditeur, il ne faut pas penser devenir riches du jour au lendemain. L’auteur publié par une maison d’édition retire généralement environ 10 % de la vente de son livre. Et les gros vendeurs, ce qu’on appelle les best-sellers au Québec, sont très rares. Donc très peu d’auteurs québécois vivent de leur plume.
M. N. – Quand on parle d’un best-seller, on parle de combien d’exemplaires vendus ?
R. D. – Un livre qui s’est vendu à 5000 exemplaires, c’est déjà très au-dessus de la moyenne des ventes dans l’industrie du livre au Québec. Tout dépend du genre littéraire. En poésie, un auteur peut vendre 500 exemplaires, et s’en réjouir. C’est très peu. Les Marie Laberge et Michel Tremblay de ce monde, il n’y en a pas beaucoup au Québec.
M. N. – Certains choisissent plutôt de publier à compte d’auteur. Quels sont les défis ?
R. D. – Lorsqu’on publie à compte d’auteur, on se lance dans quelque chose qu’on connaît peu, c’est donc un sentier à ouvrir. Ce n’est pas facile. Il n’y aura pas de travail d’édition fait sur le manuscrit, ce qui risque d’affaiblir le texte. S’il y a des erreurs dans celui-ci, et là, je ne parle pas de faute de français, mais plutôt de fautes historiques, etc. Ça peut être aussi trop de personnages, qui arrivent, on ne sait pas trop pourquoi. Ça, c’est le travail de l’éditeur. Après avoir franchi toutes les étapes de production, il faut encore faire les communications pour organiser le lancement, puis faire un travail de distribution. Il faut que ce livre-là se retrouve dans les librairies. Il faut, entre autres, que les bibliothécaires en soient informées, peut-être même le lisent, le recommandent. […] Le chemin de l’édition à compte d’auteur est difficile à parcourir.
M. N. – Comment se porte l’industrie québécoise du livre ?
R. D. – Il y a eu énormément de progrès de fait dans le domaine de l’édition au Québec surtout si l’on recule d’un demi-siècle. Il y a 50 ans, il y avait très peu de maisons d’édition québécoises. Maintenant, il y en a beaucoup. Tous les genres littéraires sont couverts, et certaines maisons d’édition ont des ententes avec d’autres maisons pour publier en Europe, ou encore pour des traductions. Le marché s’étend tranquillement pour les auteurs québécois et je pense qu’avec l’arrivée d’Internet comme outil de communication, ça peut changer la donne. (…) Il y a moyen maintenant de publier à peu de frais puisque la reproduction peut se faire par voie électronique ou même à l’unité.
M. N. –Que pensez-vous de la place toujours plus importante qu’occupe le numérique?
R. D. – Dans les salons du livre québécois, nous offrons pour l’instant le livre disons conventionnel, traditionnel, papier. Mais je pense que le numérique va prendre sa place très bientôt et ça peut aller très vite. Nous suivons avec grande attention ce qui se passe sur la scène mondiale. Au moment où l’on se parle, c’est le Salon du livre de Paris, et je sais qu’il y a une place pour le livre électronique. Suite à ce Salon, des articles vont paraître dans les revues spécialisées, des journaux, sur internet, etc. On va voir comment le Salon du livre de Paris s’est organisé pour pouvoir présenter ce produit-là, et lentement, nous allons nous aussi être de la parade.
M. N. – Le Salon du livre de Rimouski fête cette année son 45e anniversaire. Comment a-t-il participé au cours des ans au développement du livre dans l’Est du Québec ?
R. D. – Le mandat premier du Salon du livre est de voir à la promotion du livre et de la lecture sur tout le territoire à travers différentes activités. Le Salon offre une tribune aux auteurs. Nous avons l’espace qu’on appelle Solo d’auteurs qui permet, pour une somme minime de 25 $, à un auteur qui a publié à compte d’auteur de se faire connaître. On fait un horaire de séances de signature comme si c’était une maison d’édition qui prenait soin du stand, puis le livre de l’auteur est vendu tout au cours de la durée du Salon. Nous organisons aussi des événements littéraires tout au long de l’année, comme des déjeuners littéraires, où des auteurs de la région sont invités pour faire connaître leur livre aux participants.
Nous travaillons très fort à l’organisation de la 45e édition du Salon du livre de Rimouski qui aura lieu du 4 au 7 novembre prochain. Cette année, le genre littéraire à l’honneur sera le récit de voyage.