
Les oiseaux parlent au passé
François Guerrette
Les Éditions Poètes de Brousse
2009
Il y a environ un an, à la demande de François Guerrette que j’avais connu dans un cours de poésie à l’UQAR, j’avais participé, à la brasserie artisanale Le Bien, le Malt, à une lecture publique, sur musique jazz, de textes de Patrice Desbiens, l’un des poètes qui, avec Gérald Godin et le grand Miron, me fait le plus flipper. Je lisais donc un grand poète. François Guerrette, lui, du haut du début de sa vingtaine, lisait ses propres textes. J’ai flippé.
Je ne suis pas un spécialiste de la poésie, loin s’en faut. Comme plusieurs, j’ai parfois de la difficulté à me concentrer suffisamment pour déchiffrer l’univers de certains poètes. Je reconnais la qualité, leur talent, mais… je n’accroche pas. Ce n’est pas le cas avec François Guerrette. À la lecture de son premier recueil, Les oiseaux parlent au passé – quel beau titre, soit dit en passant –, les images s’installaient dans ma tête. L’auteur rimouskois dessine une poésie de tripes, de tête, de cœur; une poésie qui parle, parfois en chuchotant, parfois en criant, et qui touche sa cible, qu’on l’appelle l’âme ou le cœur.
le feu la foule l’horloge à l’envers
m’injectent de longues doses d’usure
mille couleurs de larmes pour repeindre
l’enfer en blanc le monde en miettes
Urgence révoltée
une gorgée d’air dans les veines
je me raconterais hors d’ici
un long récit rouge à lèvres
où le jour se lèverait mosaïque
le ciel couvert d’herbes rares
les fous savent de quoi je parle
La nuit se laisse aimer
Les oiseaux parlent au passé est un long poème en quatre parties : « Urgence revolver », « La nuit se laisse aimer », « L’enfer cardiaque » et « Les oiseaux parlent au passé ». Je dirais que, peu importe la façon dont on absorbe ce recueil – en un tout, partie par partie ou même, aléatoirement, en sautant d’une page à une autre –, ce poème, écrit en vers libres, trouve sens. Un peu comme une œuvre d’art visuel peut transmettre une perception et une signification différentes selon la personne qui la regarde, le poème de François Guerrette est livré à ses lecteurs pour que ceux-ci se l’approprient.
On retrouve chez François Guerrette des influences – ou des clins d’œil – à Nelligan : les corbeaux, le vin, les fous, et il cite, en exergue, Denis Vanier, Gérald Godin, Roland Giguère, Paul Chamberland et… Patrice Desbiens, ce dernier pour la partie du poème dont le titre a été donné au recueil. En couverture, une œuvre d’Edmund Alleyn, tirée de la série Éphémérides sur lavis, qui semble avoir été créée pour Les oiseaux parlent au passé et son imagerie.
Une très agréable découverte à faire en poésie : François Guerrette, qui sera au Salon du Livre de Rimouski du 5 au 8 novembre 2009.