La préposition « de » est tellement banale qu’on oublie facilement que, entre deux noms communs (exemples : boîte de carton et boîte de soupe), elle ne construit pas nécessairement la même relation. Dans le premier cas, elle désigne le matériau dont est faite la boîte, elle désigne le contenant, et dans le second, le contenu! La même chose avec la préposition « à » : boîte à bois, qui sert, dans une maison, à contenir du bois (encore faut-il ajouter de chauffage), et cabane à sucre, elle-même une sorte de maison qui contient des appareils servant à produire du sucre (encore faut-il ajouter d’érable, et savoir qu’il y a une industrie et de l’histoire derrière cette cabane)!
Cette simple structure syntaxique (X de Y, X à Y) n’est donc pas garante d’un rapport uniforme entre le langage et ce qu’il désigne dans la réalité. D’où les « distorsions » qu’on constate avec émerveillement lorsqu’un enfant invente, selon la logique de la langue dont il est en train d’intégrer, au gré de conversations avec son entourage (parents, amis), différents procédés. Un exemple : étant étendu sur le ventre, il sait que cela se dit « à plat ventre » et le dit; il se retourne sur le dos et quand il doit dire comment cela se dit, il dit, en toute logique, « à plat dos », expression que la langue française n’a pas formée! D’où, inversement, les « distorsions » qu’il y a déjà dans la langue qu’on parle et qu’on écrit, et que, tel jour, par hasard, on rencontre avec étonnement. Un exemple : si le féminin de chameau est chamelle, quel est le féminin de chapeau? La réponse, inévitable (c’est, comme en maths, une règle de trois), est chapelle!